Hécatombe

Au marché de Brive-la-Gaillarde à propos de bottes d'oignons
Quelques douzaines de gaillardes se crêpaient un jour le chignon
À pied, à cheval, en voiture, les gendarmes, mal inspirés
Vinrent pour tenter l'aventure d'interrompre l'échauffourée

Or, sous tous les cieux sans vergogne c'est un usage bien établi
Dès qu'il s'agit d'rosser les cognes tout l'monde se réconcilie
Ces furies, perdant toute mesure, se ruèrent sur les guignols
Et donnèrent, je vous l'assure, un spectacle assez croquignole

En voyant ces braves pandores, être à deux doigts de succomber
Moi, j'bichais, car je les adore sous la forme de macchabées
De la mansarde où je réside, j'excitais les farouches bras
Des mégères gendarmicides, en criant "Hip, hip, hip, hourra"

Frénétique l'une d'elles attache le vieux maréchal des logis
Et lui fait crier "Mort aux vaches, mort aux lois, vive l'anarchie"
Une autre fourre avec rudesse le crâne d'un de ces lourdauds
Entre ses gigantesques fesses qu'elle serre comme un étau

La plus grasse de ces femelles, ouvrant son corsage dilaté
Matraque à grands coups de mamelles ceux qui passent à sa portée
Ils tombent, tombent, tombent, tombent, et, selon les avis compétents
Il paraît que cette hécatombe fut la plus belle de tous les temps

Jugeant enfin que leurs victimes avaient eu leur content de gnons
Ces furies, comme outrage ultime, en retournant à leurs oignons
Ces furies, à peine si j'ose le dire, tellement c'est bas
Leur auraient même coupé les choses, par bonheur ils n'en avaient pas
Leur auraient même coupé les choses, par bonheur ils n'en avaient pas



Credits
Writer(s): Georges Charles Brassens
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