Douanes

Reniflés par un chien, les poches retournées
On nous dévisageait
À la douane, on cherchait à ne pas avoir l'air
Ni fier, ni trop aimable
L'air de ce qu'on était
Comme nous, stationnait le ciel
On attendait quelque chose, un orage

Et chacun repensait à ceux qui l'attendaient
Aux promesses de retour que tous, on avait fait
Tandis qu'on nous jaugeait, qu'on nous regardait bien
On se concentrait pour ne ressembler à rien

En nous-mêmes, on pariait, sur ceux qui resteraient
À cause de cheveux sales ou de lacets défaits
Ceux qui n'passeraient jamais, les voir nous rassurait un peu
Et quand le chien passait, nous étions moins nerveux

De frontières en frontières et de douanes en douanes
Certains ont tout passé déjà, ils ont fait le grand tour
Sans s'en être aperçu
Repassant dans des villes
Qui ont changé de nom
Qu'ils n'ont pas reconnu

Surveillés par un chien, les poches retournées
Presque méconnaissables
Tant nos visages à force d'être dévisagés
Ne savent plus se reprendre
Tant nos cartes à force d'être manipulées
Tendent à s'effacer