Procrasse

24 heures plus tard, voilà l'heure butoir
Je viens battre le tambour et scander à rebours

23 sans tracas, tout est tracé déjà
Sur la voie du confort mérité de mes efforts

22 sautille devant mes yeux, hâte de prendre part au jeu
J'ai entrepris ma vie, le rendez-vous est pris

21 trucs en main, et Procrasse rêvasse
En me disant tout et rien il embrouille ma tête
Son verre plein du matin de vinasse et de crasse
Il refait le monde serin et s'implique dans ma quête

20 et zéro heures de trop pour peaufiner mon topo
Le tout s'annonce prospère, je profite d'encore un verre

19 ne se fait pas repérer et s'efface sans se répéter
Je ne courrai pas après, j'ai le temps avec ou sans

18 suit sans surprise, je la laisse tournoyer à sa guise
Je ne suis pas paresseuse juste une patiente heureuse

17 est-il à peine? Procrasse lassé, sans gène
S'agrippe à mon bras, m'entraîne dans les draps
Une petite sieste qu'à cela ne tienne! Chaque heure suffit sa peine
Drapeau blanc, je me prélasse, toujours avec Procrasse

16 à l'aise je vais m'y mettre, maître de moi, mes idées centrées là
Ou par là, le frigo fricote avec moi,
titille mes papilles et m'éparpille

15 zinzin de décrassage, je dois laver mon linge ménager mes méninges
Qu'une tache sur la vitre me dévisage
et enragée, en nage le reflet me singe

14 tord la trotteuse qui convulse brailleuse et
l'aiguille s'entortille autour de mes chevilles
Bientôt pieds et poings liés,
je trépigne alarmée: recule tes tentacules ou je te casse la pendule

13 pèse sur ma conscience, la douleur me lance
Et Procrasse me rassure, pour panser ma blessure
Il allume l'écran: regarde comme le monde est grand
Mes yeux quittent mon cafard mais je reste seule dans le noir

12 le vent tourne et devant moi moitié moins de temps
Douce lumière dehors mais je sortirai pas encore

11 inonde mes reins, puis-je écoper mon trop plein
La nuit venue pour le temps mort,
je peux pas dormir, j'ai trop de remords

10-simule moi l'été frappe à ma porte
ou peut-être l'hiver et je fais la morte
Les saisons tournoient,
me traquent et s'emportent mais j'ai à faire alors qu'importe

9 et neuves idées que Procrasse veut échouer
Il manœuvre mon œuvre et je nous observe glisser
À la renverse envers et contre moi surtout
Il traverse mes averses et n'en tire rien du tout

8 trop vite arrivée
Et rivée sur mes pieds si petits, si flétris
Si je suis réaliste je ferai pas des pas de géant
Ai-je trop à risquer à bondir sans élan

7 désillusion s'abat sur moi et je
tombe avec elle mais y a toujours plus bas
Alors j'élève au plus haut ma voix mais
d'autres crient toujours plus fort que moi

6 c'est juste l'herbe qui me paraît si verte ailleurs
Procrasse m'assure que c'est pour mon petit être bien trop de rigueur

5 vaincrai-je ces craintes, qui ne m'appartiennent pas
Procrasse me les donne et s'abandonne dans mes bras
Il ne pense qu'à lui, il a peur de la vie
Le reconnaîtra-t-il? Qui me reconnaîtra

4 me happe et me donne de l'âge
Comme chaque heure passée à mes enfantillages
Je contrôle plus mon tambour et le rythme accélère
Pour rentrer dans les temps, faut que je persévère

3 à l'étroit, les temps changent,
ils deviennent tout petits,
tout serrés, tout pleins de gens, tout bruyants
Le plus dur était fait, je voulais être mûre assez,
mais j'ai trop tourné dans le vin, le vent, le cadran

2 sonne de peu et je détourne mes yeux
de l'affolement circulaire remis en jeu
Un pari insensé,
je rattrape mes dés pour bosser un plan pré-mortem adapté

Plus qu'une
Et puis aucune, mon heure si vite passée
Et les flèches indécises continuent de viser
Des numéros au hasard
Tard vaut mieux que jamais
Et je remets à demain, à demain, à demain en vain

Et 4 heures plus tard voilà l'heure butoir
Je viens battre le tambour et scander à rebours



Credits
Writer(s): Maïlys Blanchard
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