La folle complainte

Les jours de repassage, dans la maison qui dort
La bonne n'est pas sage, mais on la garde encore
On l'a trouvée hier soir, derrière la porte de bois
Avec une passoire, se donnant de la joie
La barbe de grand-père a tout remis en ordre
Mais la bonne en colère a bien failli le mordre

Il pleut sur les ardoises, il pleut sur la basse-cour
Il pleut sur les framboises, il pleut sur mon amour
Je me cache sous la table, le chat me griffe un peu
Ce tigre est indomptable et joue avec le feu
Les pantoufles de grand-mère sont mortes avant la nuit

Dormons dans ma chaumière, dormez, dormons sans bruit
Berceau berçant des violes, un ange s'est caché
Dans le placard aux fioles où l'on me tient couché
Remède pour le rhume, remède pour le cœur
Remède pour la brume, remède pour le malheur

La revanche des orages a fait de la maison
Un tendre paysage pour les petits garçons
Qui brûlent d'impatience deux jours avant Noël
Et, sans aucune méfiance, acceptent tout pêle-mêle La vie, la mort, les squares
Et les trains électriques, les larmes dans les gares
Guignol et les coups de triques, les becs d'acétylène
Aux enfants assistés et le sourire d'Hélène
Par un beau soir d'été

Donnez-moi quatre planches
Pour me faire un cercueil
Il est tombé de la branche, le gentil écureuil

Je n'ai pas aimé ma mère, je n'ai pas aimé mon sort
Je n'ai pas aimé la guerre, je n'ai pas aimé la mort
Je n'ai jamais su dire pourquoi j'étais distrait
Je n'ai pas su sourire à tel ou tel attrait
J'étais seul sur les routes sans dire ni oui ni non
Mon âme s'est dissoute, poussière était mon nom



Credits
Writer(s): Charles Louis Trenet, Guy Georges Luypaerts
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