Ronde

Il faut bien dire que sa circonférence
Dans la région, servait souvent d'référence
On la comparait en gros à un tonneau
Relief rebondi du bas jusqu'en haut

On la trouvait sympa et drôle, la rondouillarde
Ronde répondait, placide, aux plaisanteries gaillardes
Pour elle, aplanir les problèmes commençait par les cuisses
Et supporter les mains exploratrices

L'amour de la chair, au sens épais du terme
Faisait de Ronde le goûter gourmand des p'tits trouffions en perm
Son corps à elle, elle trouvait qu'il n'était pas le sien
Alors, elle le laissait à chacun

Mais un jour, elle se dit
"C'est pas mon monde
Quittons-le, ici
Gît Ronde"

Comment pouvoir marcher la tête haute
Quand à chaque coin de rue, il y a le regard des autres?
Jamais personne ne lui disait qu'il l'aimait pour elle
Mais pour ses courbes et ses mamelles

Alors un jour, elle se dit
C'n'est pas monde
Quittons-le, ici
Gît Ronde

Pourtant un jour, Ronde fit tout pour que l'aime Sébastien
Celui qui faisait la circulation au carr'four du coin
Mais il n'aimait que les maigres, pour passer au travers
Pour pouvoir toucher, toucher la terre

Mais un jour, elle se dit
C'est pas monde
Quittons-le, ici
Gît Ronde

Ce sont tous ces coups d'oeil et les phrases imagées
Qui ont réussi, malgré sa masse, à la bouffer
Montgolfière d'elle même, elle le restait
Mais peu à peu, lâcha, coula

Les gens qui passent près d'la tombe de Ronde sont un peu tristes
Mais si le temps s'y prête, les phrases glissent vite, très vite
Sur la taille du cercueil, ou du large trou creusé
Propos graveleux, disproportionnés

Alors, ici gît Ronde
C'est là, c'est là que gît Ronde
Que gît Ronde
Ronde, Ronde, Ronde, Ronde
Ronde, gît Ronde
Gît Ronde, la ronde