Naissance

De nausées en maux de têtes, le voyage avait commencé là
Son corps lui envoyait des signes, des messages qu'elle ne comprenait pas
Quelque chose avait changé, au plus profond de ses entrailles
Fallait-il que pour l'amour, ces nausées la tenaillent?

Jamais elle n'avait prêté autant d'attention à ce que lui disait son ventre
Que se passait-il donc dans son être, dans le secret intime de cet antre?
Assis sur ce banc dans le parc, elle écoutait le chant des oiseaux du printemps
Et une voix intérieure lui chantait la chanson des mamans

Qui donc était ce visiteur qui l'habitait sans gêne, ici un geste, et soudain un coup
Puis le silence, puis le sommeil. Il avait son rythme, ses besoins, et savait même être doux
Autour d'elle on lui parlait de ce jour de la naissance, où il entrerait dans sa vie
Mais la vie était déjà là, et ils dialoguaient en silence de leurs désirs, et de leurs envies

Elle avait appris sa langue, il savait se faire entendre
Un geste était parole, un message à comprendre
Une langue avant les mots, la vie avant la vie
Que seule une maman sait, que les pères leur envient

Quel était donc le secret de ce dialogue des êtres des plus secrets?
Une maman qui écoute et se confie quand le monde croit qu'elle se tait
Un bébé qui sans les mots sait dire la douleur et l'amour
Et tous deux, loin du monde, protègent seuls les chaleurs du jour

Depuis des mois ils se parlent, lui, avec son corps ployé et ses mains à l'intérieur,
Elle, de ses gênes, de son poids, de ses fatigues, de ses doutes et de ses peurs
Dans le parc, hier, elle se demandait pourquoi il fallait qu'il vienne dans la souffrance
Il était là, déjà, en elle, si doux, pourquoi fallait-il la douleur des naissances?

Elle promenait la vie, et ses questions et ses peurs. Il fallait donc accepter de souffrir
C'est le message éternel de la vie, ceux que tu aimes t'apprennent à le vivre
Ils viennent et ils partent dans la douleur, et toi seul sait la force et la clef
Écoute les mamans, de leur ventre nous vient l'initiation ultime, et cette vérité

Elle avait appris sa langue, il savait se faire entendre
Un geste était parole, un message à comprendre
Une langue avant les mots, la vie avant la vie
Que seule une maman sait, que les pères leur envient

Que de douleurs, que de cris, que d'amour, que de larmes d'espoir
Traverser la souffrance, et au rythme des soupirs, sa tête se fait voir
De la vie à la vie, il vient dire encore, par ses premiers sanglots
Qu'il avait tant aimé vivre, libre et baigné, dans la chaleur des eaux

Il pleure, il gémit, ils ont coupé le cordon; un bonheur, tellement de peur, et tellement de cris
Leurs larmes se parlent, une conversation intime sans un mot, sans bruit
Il la cherche dehors comme il était dedans, elle espère sa chaleur aux formes de son corps
C'est une fille, elle pose sa joue sur son ventre, et, corps à corps, elle lui parle encore

C'est le plus grand secret, le plus beau des rites. Sa fille sur son ventre, une nouvelle vie
Du fond de son être la maman enseigne la vérité des langues et de la poésie
Et l'enfant s'apaise, et la fille sourit. Et la maman confie le miracle éternel
Une douce caresse murmure sa confession: la vie est cadeau, mon Dieu qu'elle est belle

Elle avait appris sa langue, elle savait se faire entendre
Un geste était parole, un message à comprendre
Une langue avant les mots, la vie avant la vie
Que seule une maman sait, ce don qu'on leur envie



Credits
Writer(s): Tariq Ramadan
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